Dire que le fabricant cédait tous ses droits à l’exhibiteur signifie également que le premier cédait au second le droit de présenter jusqu’à ce que celui-ci soit usé à la corde le film-token qu’il avait acheté. En effet, comme les fabricants n’offraient qu’un seul mode d’appropriation des vues, par l’achat en bonne et due forme de copies, cette transaction exigeait de la part de l’exhibiteur un investissement ne pouvant être amorti que par une exploitation prolongée des mêmes bandes ; ce qui n’était pas vraiment désavantageux pour lui financièrement, puisqu’il avait la possibilité de renouveler son public en se promenant de village en village ou de ville en ville. La préoccupation de l’exhibiteur ne consistait donc pas à renouveler son stock de films-tokens, mais plutôt à renouveler son public. Ce qui, sur le plan commercial, n’était guère stimulant pour l’économie de la « fabrication » des vues, puisque cela ne favorisait pas l’entrée de nouveaux titres sur le marché.