TO: Philippe MARION <*****@*****.**>, André GAUDREAULT <*****@*****.**>
FROM: Simon Thibodeau <*****@*****.**>
CC: BCC: Subject: Re: FW: CONTRÔLE
Bonjour Philippe, bonjour André,
André m’a invité à commenter l’idée de “contrôle” qu’il a proposée. Voici très rapidement ce que ça m’inspire. J’espère que ce n’est pas trop flou et que ça puisse vous être utile.
Alors qu’on pourrait dire que les spectateurs « traditionnels » du cinéma devaient en quelque sorte accepter de lire un film de manière passive, selon des modalités prédéterminées de production et de consommation des images animées, les technologies numériques (mais aussi la TV, la télécommande, la caméra vidéo, etc.) les ont transformés en « usagers », c’est-à-dire qu’ils ont maintenant une certaine forme de « contrôle » tant sur les modalités de consommation que sur celles de production des images animées.
Il ne s’agirait pas d’un « transfert de contrôle » absolu ou “atteignable” à plus ou moins long terme, mais plutôt d’une sorte de partage du contrôle, des usages qui peuvent être fait des images animées. Cette idée rejoint celle de « liberté très contrôlée » évoquée par Laurent Le Forestier et qu’il étaye en reprenant les propos de Deleuze (passage d’une société disciplinaire à une société de contrôle).
Je crois toutefois que les idées de Michel de Certeau dans Arts de faire 1 seraient mieux adaptées à votre propos qui n’a pas le ton un peu pessimiste de Foucault ou Deleuze. De Certeau utilise d’ailleurs un lexique proche au vôtre (usages et usagers, consommation de la culture). La distinction qu’il fait entre usages stratégiques (les modalités « imposées » aux usagers) et usages tactiques (la manière propre à chacun de faire usage de ces stratégies ou, si on veut, des normes institutionnelles). J’ajouterais que, selon ce point de vue, les spectateurs “traditionnels” (entendre: avant le numérique, ou avant la télécommande, etc.) n’étaient pas nécessairement davantage soumis ou passifs lors de la réception d’un film (ils ont toutes sortes de manières de prendre du recul, par exemple en faisant un usage singulier de la salle de cinéma – sortie en groupe, se faufiler dans une deuxième séance sans payer, etc.), mais ils n’avaient toutefois pas les moyens (pas même un moyen potentiel) de faire un usage “direct” de l’image cinématographique, que ce soit dans la manière de la consommer ou de la produire, ce que permettent les technologies numériques de manière inédite.
[…]
Pardonnez-moi les idées et les phrases confuses! Et bon courage!
Simon